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Burkina : le pouvoir judiciaire était malade depuis bien longtemps ( Zéphyrin KY)

Dans une analyse du point de vue de l’histoire du Burkina Faso, Zéphyrin KY, professeur d’histoire à la retraite tente d’expliquer la situation actuelle que vit le pays. Pour lui, ce sont les compromission accumulés de l’ancien pouvoir et celles du peuple qui ont aboutit à contexte pareil. Et de son avis, les difficultés que l’appareil judiciaire éprouvent aujourd’hui ne sont que le résultat du « laisser-faire » et du « laisser-piller » qui a eu cours durant 27 ans. Les lignes qui suivent constituent l’avant dernière partie du récit de l’historien. 

Sous Blaise COMPAORE, le troisième pouvoir restait atone ou avait disparu. Le pouvoir judiciaire était inexistant. Inexistant du fait de son immobilisme total face à la pléthore, à la panoplie de jugements à rendre, aux dossiers datant de plusieurs années qui attendent.

Nous ne nous rappelons pas avoir vu ou entendu sous le régime de Blaise COMPAORE, pendant ses 27années de règne, qu’on avait mis la main au collet d’un délinquant à col blanc coupable d’avoir vidé les caisses d’une société d’Etat ou grappillé les fonds publics d’une Institution. Les dossiers de crimes de sang, de crimes économiques, les délits d’atteintes aux droits de l’homme tant décriés par tous sont restés dans les tiroirs et autres armoires des institutions judiciaires. Ainsi la justice était bâillonnée, muselée, tenue en laisse : Jupiter régnant en maitre absolu comme Président du Conseil Supérieur de la Magistrature.

Le président COMPAORE a tellement joué la carte du « laisser-faire », du « laisser-piller » que les observateurs ont conclu que cette pratique érigée en système de gouvernement était un moyen pour « enfariner la bouche de l’âne » et ôter toute velléité, toute opposition ou adversité future à tout ancien collaborateur qui s’est rendu coupable de détournement ou d’enrichissement illicite. Le dossier dont il détenait généralement une copie et mis en veilleuse était une épée de Damoclès pouvant s’abattre à tout moment sur l’imprudent récalcitrant qui oserait le défier.

Ce chantage à la peur se conjugue avec une chloroformisation des cadres du système pour s’assurer une docilité et une servilité de bête de somme.

Pendant vingt-sept années de règne, il n’y avait plus de séparation de pouvoir, plus de justice, plus de probité pour la chose publique. L’impunité régnait en maitre, l’incivisme est apparu subitement et est devenu quasi endémique parce que l’Etat  avait perdu tout crédit, tout respect. « Le poisson avait pourri par la tête.» Nous avons pu constater par nos expériences vécues que la vertu et l’honnêteté dans certaines administrations étaient devenues un délit.

La République et l’Etat étaient en danger de mort. Aujourd’hui certains politiciens et autres démagogues tentent de faire croire que la responsabilité « d’un pays malade de sa justice »,  « d’un pays malade de son armée », « d’un pays malade de sa sécurité »… est au compte du régime actuel,- entré en fonction seulement le 30 décembre 2015, c’est-à dire il y a à peine quatre ans- comme si cet état de fait était survenu comme par génération spontanée.

L’héritage légué par Blaise COMPAORE du point de la justice dont il était le Président est déshonorant pour l’Institution Judiciaire et pour le pays. Cet état de fait est connu de tous. Mais il faut le dire pour y remédier. La situation actuelle quant à la personnalité ou la responsabilité de la justice est totalement différente .La justice n’est plus aux ordres. L’institution judiciaire est « déconnectée » de la présidence de la République. Le président du Faso Roch Marc Christian KABORE n’est plus le Présent du Conseil supérieur de la Magistrature. Le troisième pouvoir a son Président. La justice est «  indépendante et libre »

Malgré toutes ces dispositions, nous constatons cette tendance à « vouloir quelque chose et son contraire. »

Face à l’inertie, au silence de la justice, des voix s’élèvent souvent pour interpeller, appeler le président du Faso. Si on ne lui demande pas ouvertement de mettre la pression sur l’institution judiciaire, d’intervenir ou d’agir d’une façon ou d’une autre, on l’accuse d’une  « mal gouvernance de la justice », d’être responsable de la lenteur des jugements à rendre. Autrement dit, on voudrait implicitement qu’il s’immisce dans les affaires de l’Institution Judiciaire. Toute chose incompatible avec la séparation des pouvoirs. Et s’il le fait, ce sont les mêmes voix qui s’élèveront pour condamner une ingérence. Tout cela fait désordre. Les gens doivent avoir le courage d’interpeler ou de s’adresser directement à qui de droit.

La haute main sur l’armée et la magistrature avait une fonction maitresse, un but spécial, maintenir Blaise COMPAORE et son parti au pouvoir ; les y fixer, les y incruster à jamais.

L’armée et la magistrature étaient les principales composantes de l’architecture que s’était bâtie Blaise COMPAORE pour un pouvoir à vie. (A suivre)

Lire la 1ère partie : Burkina : politique, terrorisme, et fronde sociale, retours vers le passé

Zephyrin KY

Professeur d’Histoire

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