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Difficultés liées à la prise en charge du cancer du sein : « Il faut qu’il y ait (au moins) une subvention qui permette aux patientes de se prendre en charge », selon Dr. Augustin Tozoula BAMBARA, oncologue médicale

Plusieurs femmes au Burkina Faso vivent dans la tourmente avec le cancer du sein. De consultation en consultation, d’examen en examen, ces femmes ne savent plus à quel saint se vouer telle la prise en charge liée à cette maladie n’est pas chose aisée. Le Dr. Augustin Tozoula BAMBARA, Oncologue médicale au CHU-Yalgado Ouédraogo, a souhaité que même si la prise en charge du cancer du sein par le gouvernement ne sera pas totale, qu’ « il y ait (au moins) une subvention qui permette aux patientes de se prendre en charge ». Il le fait savoir dans l’entretient que nous avons eu avec lui.

Infowakat.net (IWN): De façon générale, dite-nous qu’est-ce que le cancer ?

Dr. Augustin Tozoula BAMBARA (ATB) : Le cancer d’une façon générale est une prolifération anarchique de cellules, c’est-à-dire que les cellules ne répondent plus au mécanisme de contrôle de l’organisme. Ces cellules qui vont se multiplier de façon anarchique auront tendance à détruire les cellules voisines, les tissus et les hormones voisins. Ces cellules auront tendance à se déplacer et à s’installer dans d’autres organes à distance pour se multiplier de façon anarchique, ce qui est appelé métastase. Et si rien n’est fait l’ensemble de ce processus peut entrainer la mort du sujet.

IWN: Parlant du cas spécifique du cancer du sein, comment se manifeste-il ?

ATB: Le cancer du sein comme je l’ai décrit précédemment est une prolifération anarchique de cellules mais au niveau du sein. Ce cancer peut se manifester de plusieurs façons. Mais la manifestation fréquente que nous rencontrons en consultation c’est l’apparition d’une boule au niveau du sein. Il n’y a pas que la boule, il y a plusieurs autres signes qui peuvent attirer l’attention vers un cancer de sein. Il s’agit de toute modification qui va s’opérer sur la surface du sein. Il peut y avoir des crevasses, des plis qui se forment sur la peau du sein et aussi la modification du mamelon. On peut aussi découvrir un cancer du sein à l’issu d’un écoulement au niveau des mamelons qui est souvent suivi de sang. Il y a d’autres signes qui sont un peu plus rares, comme l’apparition de ganglion au niveau des aisselles qui peuvent attirer l’attention sur le sein.

IWN: Comment savoir qu’une femme est atteinte de cancer du sein ?

ATB: Pour une femme qui a des soucis au niveau du sein il sera difficile pour elle de savoir s’il s’agit d’un cancer de sein ou pas. Il faut que la patiente consulte un médecin qui va proposer des examens para-cliniques et d’autres examens qui peuvent orienter vers le cancer du sein. C’est une biopsie, c’est-à-dire le prélèvement du morceau de tissus de la boule ou de l’anomalie, qui peut permettre de confirmer le cancer du sein.

Ecoutez l’interview ici

IWN: Plusieurs pathologies sont dues à une mauvaise alimentation. Peut-on éviter le cancer du sein par l’alimentation ?

ATB : Il serait compliquer d’éviter le cancer du sein par l’alimentation parce que jusqu’à présent il n’y a pas de cause alimentaire bien définie sur le cancer du sein. Mais il y a des habitudes alimentaires qui peuvent constituer un risque vis-à-vis du cancer du sein. Il s’agit des alimentations riches en graisse et celles pauvres en fibres, en fruit et en légumes. Le fait de consommer excessivement l’alcool peut constituer un risque de cancer. Il est difficile d’éviter le cancer du sein  par l’alimentation mais une alimentation saine et équilibrée peut empêcher d’avoir un cancer du sein.

IWN: Peut-on guérir du cancer du sein ?

ATB : On peut guérir du cancer du sein mais tout dépend du stade auquel on le découvre. Pour un cancer découvert très tôt et sans manifestation clinique, il y a beaucoup de chance pour le sujet de se remettre complètement de cette maladie. On ne parlera pas de guérison mais de rémission complète du sujet.

IWN: Comment se fait la prise en charge  des patientes ici à Yalgado Ouédraogo ?

ATB : En fonction du stade de la maladie, on va proposer un traitement ou un schéma thérapeutique qui va prendre en compte l’ensemble des moyens de traitement que nous avons. Il y a la chirurgie, la chimiothérapie, l’hormonothérapie, la radiothérapie, etc. Tous ces moyens thérapeutiques vont entrer en jeux dans la prise en charge du cancer en fonction du stade de la maladie.

IWN : Y a-t-il une subvention de l’Etat dans la prise en charge des patientes quand on sait qu’il y a certaines personnes qui, avec le cout élevé de certains examens, n’arrivent pas à se prendre en charge ?

ATB : Officiellement je n’ai pas connaissance d’une subvention pour soutenir ces personnes. Certaines patientes sont prises en charge par des structures caritatives et souvent par certaines organisations confessionnelles. Il n’y a pas de circuit officiel de subvention comme c’est le cas pour la gratuité des soins. Tout ce que nous faisons ici est à la charge des patientes.

IWN : Quelle est alors l’action du gouvernement dans cette prise en charge des femmes victimes du cancer de sein ?

ATB : L’action du gouvernement est assez vaste à commencer par le plan stratégique du cancer de façon générale qui va s’intéresser à tout ce qui est en rapport avec la prévention, le dépistage et tout ce qui est en rapport avec le traitement. Il y a un plan stratégique qui a été adopté dans le cadre de l’organisation de la prise en charge du cancer du sein dans le pays. Ce plan stratégique est en train d’être mis en œuvre à différents niveaux. Il y a également le centre de cancérologie qui est en construction et on espère qu’en 2018 ce centre sera fonctionnel.

IWN : Quel plaidoyer avez-vous à faire pour atténuer la souffrance des patientes qui n’ont pas les moyens pour se prendre en charge comme il se doit ?

ATBJe souhaite que le gouvernement fasse beaucoup plus d’effort et assez vite parce qu’on se rend compte qu’une patiente qui vient en consultation est limitée déjà par la prise en charge de sa maladie par manque de moyens. Il y a des examens qui ne sont pas disponibles et même avec ceux qui le sont on se rend compte qu’il n’y a pas suffisamment de moyens pour les faire. Il en est de même pour les médicaments. Il faudra trouver un système d’assurance maladie qui puisse permettre de prendre en charge ces patientes qui ont besoin de beaucoup de moyens pour se faire soigner. Cela se fait dans certains pays et même si cela n’est pas fait à 100% ici, qu’il y ait ( au moins) une subvention qui permette aux patientes de se prendre en charge. Nous avons mené une étude sur la chimiothérapie, et nous nous sommes rendu compte que sur 137 patientes, une seule a suivi correctement la chimiothérapie comme il se doit. Le principal facteur identifié pour expliquer cette non observance c’est le manque de ressources financières.

IWN : A combien pouvons-nous estimer le nombre de femmes vivant aujourd’hui avec le cancer de sein au Burkina Faso ?

ATB : On estime que le cancer du sein est le premier cancer de la femme dans le monde et dans la plupart des pays. On estime cependant que chaque année au Burkina Faso, pour cent mille femmes, 22,7 d’entre elles vont présenter le cancer du sein. Si l’on rapporte ce nombre à la population générale de femmes, il y a deux mille (2000) nouveaux cas de cancer du sein chaque année au Burkina Faso. Mais ces cancers ne sont pas tous diagnostiqués. Il y a aussi certaines femmes qui sont dans les zones périphériques du pays et qui n’ont pas accès aux soins ni au moyens de diagnostic.

IWN : Nous sommes à terme de notre entretien. Avez-vous un dernier ?

ATB : Il est vrai qu’il faut des moyens pour traiter le cancer mais comme on aime à le dire, mieux vaut prévenir que guérir ! En matière de cancer du sein il peut être difficile de prévenir son apparition mais ce que l’on peut faire c’est de le détecter tôt. Il y a des mesures de dépistage pour les femmes que sont la mammographie couplée à l’échographie mammaire que les femmes doivent faire chaque année à partir de 40 ans ou même avant cet âge parce que l’on a tendance à voir le cancer qui apparait chez les femmes jeunes. Pour détecter un cancer tôt c’est le dépistage par la mammographie. Mais la mammographie n’étant pas toujours à notre portée, ce que les femmes peuvent faire tous les jours chez elles à la maison, c’est l’auto examen des seins. Elles peuvent apprendre à examiner leurs seins, à les regarder et à les palper tous les mois pour voir s’il y a une anomalie. En cas d’anomalie, ne pas hésiter à consulter un médecin qui va prescrire d’autres examens pour savoir s’il s’agit d’un cancer de sein ou pas.

Entretien réalisé par Armand Kinda

Infowakat.net

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