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« Objectif Kadhafi » : Comprendre les enjeux géopolitiques en Libye

Patrick Mbeko est un politologue canadien d’origine congolaise et spécialiste des enjeux géopolitiques de la région des Grands Lacs Africains.

Il est auteur de plusieurs ouvrages dont Le Canada dans les guerres en Afrique centrale en 2012 et Stratégie du chaos et du mensonge : Poker menteur dans l’Afrique des Grands Lacs en 2014 (co-écrit avec Honoré Ngbanda Nzambo). Son dernier livre, publié en 2016, aux éditions Libre-Pensée, s’intitule, Objectif Kadhafi.

Dans cet entretien accordé à Thinking Africa, il revient sur les motivations qui l’ont amené à travailler sur la Libye, expose les leçons du destin de Kadhafi pour l’Afrique, décrypte les processus des guerres hors-la-loi que connaît l’Afrique, et apporte un éclairage sur l’Afrique de demain, du point de vue géopolitique.

Quelques verbatims extraits de l’interview

Sur le défi du livre Objectif Kadhafi

Je voulais d’abord que l’histoire de la Libye soit racontée par un Africain de manière très objective, je voulais ensuite apporter une nouvelle manière de faire les choses dans les enquêtes que nous produisons. En abordant le sujet, je me suis rendu compte qu’il fallait faire un travail de pédagogie, de journalisme et d’investigation.

Sur la guerre contre la Libye

Economiquement parlant, Kadhafi a plus investi en Afrique que toutes les institutions internationales réunies. Nous savons que le FMI et la Banque Mondiale sont des instruments de pression et de mise sous tutelle des économies africaines. Quand Kadhafi s’interpose et joue le rôle de leader pour court-circuiter le système occidental, il devient un ennemi à abattre. La guerre contre la Libye était aussi une guerre contre le développement de l’Afrique.

Sur le droit international

Le droit international est une escroquerie intellectuelle. Il ne repose sur rien. En réalité, sur l’échiquier international ce sont les rapports de force qui priment. Le droit international s’efface devant les intérêts importants des grandes puissances. Quand ils décident d’attaquer la Libye, ils violent le droit international. Ce que nous devons comprendre, nous africains, c’est que sur le plan international, le droit n’existe pas, mis à part celui du plus fort.

Sur l’Etat profond

L’Etat profond est un Etat qui est parallèle à l’Etat officiel pour faire simple. C’est une composante importante de l’oligarchie et de l’Etat officiel qu’on ne voit et qui fonctionne secrètement. Il est important de comprendre le concept de l’Etat profond, parce que nous avons une perception biaisée de ce que l’on appelle la démocratie en Occident.

Sur les leçons à tirer de la prise de pouvoir par Kadhafi en 1969

Savoir s’organiser et apprendre à travailler sur le long terme. C’est ce qui fait défaut en Afrique… C’est à ce niveau que le coup d’Etat de Kadhafi en 1969 nous enseigne. Nous mettons en place des organisations et nous voulons atteindre nos objectifs très rapidement sans prendre le temps qu’il faut, sans prendre en compte l’environnement. Il faut être très bien organisé, prendre le temps qu’il faut et intérioriser le fait que je peux commencer un projet, m’arrêter en chemin et laisser un autre continuer le projet.

Sur l’américanisation des économies

Les américains, très souvent, ne font pas seulement des guerres pour exploiter les richesses d’un pays, ils font des guerres pour américaniser les économies des pays. Parce que quand vous avez une économie américanisée, elle est directement greffée au modèle capitaliste américain et devient dépendant de ce modèle là. C’est un système de prédation sophistiqué que Kadhafi avait compris. Et il a préféré mettre en place un système propre aux libyens. Et c’est d’ailleurs ce qui a engendré la prospérité en Libye. Cela peut nous interpeller, nous africains, qui voulons faire avancer nos pays en pensant que développer le pays, c’est copier le modèle occidental qui a échoué.

Sur les programmes de type YALI

Nos adversaires travaillent sur le long terme. L’impérialisme occidental a compris que les africains ouvrent un peu les yeux sur leur fonctionnement et se rend compte qu’il ne pourra plus mener des guerres comme avant ou en imposer inutilement, alors qu’est-ce que les occidentaux font ? Ils préparent les esprits africains à faire ce travail là à leur place. C’est ça le programme de type YALI… Les Africains doivent travailler sur le long terme. Et cela doit commencer dans le système éducatif.
Une interview de Thinking Africa
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