L’interrogatoire du Sergent-Chef Lahoko Mohamed Zerbo a repris à l’ouverture de l’audience ce samedi 30 juin 2018 et se poursuivra le lundi prochain à partir de 9h. L’accusé a révélé qu’il y avait des éléments hostiles infiltrés dans les rangs qui travaillaient à saper les actions du Régiment de sécurité Présidentielle (RSP) qui étaient de maintenir l’ordre. Ce qui, à l’en croire, serait à l’origine des conséquences déplorables de ce putsch.
Que retenir de l’audience de ce jour ? Le putsch de septembre 2015, selon l’accusé à la barre, a connu l’infiltration d’éléments hostiles de l’ex Régiment de Sécurité Présidentielle (RSP), surnommés des « tontons flingueurs » par Me Sombié de la défense. Le sergent-chef Zerbo qui avait une mission d’observation le 16 septembre 2015 au côté Ouest du palais présidentiel, mais aussi d’escorte et de maintien de l’ordre, a indiqué à la barre qu’il y avait d’autres éléments du RSP qui travaillaient contre ceux qui étaient censés maintenir l’ordre. « J’ai moi-même essuyé des tirs sur la voiture que je conduisais, côté chauffeur et côté chef de corps », témoigne-t-il.
Contre toute attente, le sergent-chef Zerbo a nié les faits de meurtre et de coups et blessures volontaires à lui reprochés dans ce procès. « Il semblerait que j’ai tué 13 personnes. Je n’ai pas tué quelqu’un. Peut-être que ceux qui m’accusent vont bien me renseigner sur ces accusations », soutient-il, insistant sur le fait qu’il y avait une dizaine d’éléments « hostiles » qui avaient infiltré le corps et semaient la zizanie. A en croire l’accusé, ces personnes ont été mis aux arrêts mais aucun d’entre eux n’est accusé aujourd’hui. « Aucun d’entre eux n’est ici » regrette-t-il.
Après que l’accusé a rejeté les faits à lui reprochés, le parquet militaire a estimé qu’il serait mieux de reconsidérer les accusations initiales qui incluaient le crime contre l’humanité parce qu’il n’y a pas de preuves constituées pour dire que telle ou telle personne est l’auteur de tel ou tel meurtre. Mais pour Me Bonkoungou de la défense, les faits de crime contre l’humanité n’ont pas été requalifiés en meurtre mais « disqualifiés » pour donner le meurtre. Et à Me Olivier Yelkouni de rappeler que les éléments constitutifs des faits de crime contre l’humanité n’étaient pas réunis ce qui a valu leur requalification en meurtre. Mais le procureur militaire ne tergiverse pas. « Le meurtre est inclus dans le crime contre l’humanité, donc ça ne doit pas poser de problème», rappelle-t-il.
Même si la défense dans son intervention tente de faire croire qu’il n’y a pas lieu de requalifier les faits au cours des débats, Me Saïdou Neya de la partie civile, s’appuyant sur l’article 75 du code de justice militaire, a indiqué qu’à la clôture des débats, des questions subsidiaires peuvent être soulevées pour requalifier les faits, ce qu’il appelle la « requalification évolutive ». Dans le même sens, le président du tribunal Seidou Ouédraogo a rappelé à la défense qu’il est « prématuré » au stade actuel des débats de parler de la requalification des faits. « Ça peut se faire à la clôture des débats », précise-t-il.
« Si c’était à refaire (…) je ne le ferai plus »
Interrogé sur ce qui s’est passé en septembre 2015, l’accusé a regretté les faits avant de rassurer que « si c’était à refaire pour aboutir aux mêmes conséquences déplorables qui ont attristé beaucoup de personnes, je ne le referai plus ». Mais en tant que militaire sous des ordres de sa hiérarchie, poursuit-il, « si on me donne des ordres dans un canevas bien précis, je les effectuerai ». Il explique qu’un subordonné ne devrait pas discuter les ordres de ses supérieurs hiérarchiques. « Chez les militaires on exécutes les ordres sans murmurer », martèle-t-il. Mais le procureur, dans son intervention a fait comprendre que le subordonner peut discuter de la légalité des ordres qui lui sont donnés avec son supérieur. Mais pour le sergent-chef Zerbo, les ordres ne se discutent point. « Ils s’exécutent ! », insiste-t-il.
Armand Kinda
Infowakat.net